mercredi 13 janvier 2010

Mozambique : annulation d’un grand projet de biocarburants

Le Conseil des Ministres du Mozambique a fait une annonce importante fin décembre 2009, l’annulation d’une concession de 30 000 ha de terres à l’entreprise de production de biocarburants Procana, dans le District de Massingir.

La Loi sur les Terres du Mozambique, adoptée en 1997, est très particulière. Les terres ont été nationalisées au moment de l’indépendance du pays [en 1975], et la Loi sur les Terres n’a pas changé le statut de la propriété foncière. Elle a donné à l’État des outils bien définis pour gérer l’utilisation des terres. Les investisseurs du secteur privé peuvent conclure un bail d’une durée de 50 ans, le DUAT (Direito de Uso e Aproveitamento de Terra, Droit d’Usage et d’Exploitation de la Terre). Mais ce contrat n’entre pleinement en vigueur qu’après une période probatoire de deux années, pendant laquelle les investisseurs doivent prouver qu’ils utilisent la terre de façon productive.

L’affaire du bail de Procana, qui concerne une immense région limitrophe du Parc Naturel International du Limpopo [en portugais], a fait polémique dès son origine, en 2007. Des villageois de la zone du Parc Naturel devaient être réinstallés sur des terres qui ont ensuite été concédées à Procana pour produire de la canne à sucre. Ces villageois avaient besoin de ces terres comme pâtures, ne vivant que de l’élevage. Et il ne semblait y avoir aucune solution de prévue pour résoudre ce conflit à venir. En outre, les besoins en eau que nécessite la culture de la canne à sucre ont provoqué la crainte que le projet de Procana n’entrave la production alimentaire locale. Des associations, issues de la société civile, ont soutenu les villageois dans leurs négociations avec les responsables du Parc Naturel, par l’intermédiaire d’un projet, Lhuvuka [en portugais], mais aucune avancée n’a pu être obtenue de Procana.

[…]

Certaines informations expliquent, sur Internet, que les principaux investisseurs dans Procana ont perdu confiance en cette société courant 2009. Le Gouvernement a annulé officiellement sa concession pour “manque de productivité”, seuls 800 ha ayant été défrichés au cours des deux premières années d’exploitation, sur un total de 30 000 ha, ce qui n’a pas créé beaucoup d’emplois. Comme pour tout contrat de cette importance, il était à l’origine estimé à plus de 500 millions de dollars, on ne peut que supposer que bien des considérations politiques et économiques ont joué.

Il est difficile de juger si l’affaire Procana constitue un précédent intéressant pour la gestion des terres du Mozambique, si le Gouvernement étudiera avec la même attention les contrats, toujours plus nombreux, de location de terres à des investisseurs étrangers. Ou s’il s’agit d’une simple exception, d’un résultat exceptionnellement mauvais de la part d’un investisseur étranger. Ou des deux.


Source : Un article de Global Voices.

Xavier Dufail

Laisser un commentaire