vendredi 7 décembre 2007

Compenser pour mieux réduire : le marché de la compensation volontaire

Cette note fait un point très documenté sur ce qu’est la Compensation, comment cela fonctionne, les problèmes posés pour garantir son intégrité, l’état du marché et les prévisions d’évolutions, les acteurs… Des annexes apportent les données objectives.

« Compenser pour mieux réduire : le marché de la compensation volontaire »

Note d’études n°11, septembre 2007, de la Mission Climats de la Caisse des Dépôts française

- Auteurs : M. Valentin Bellassen et M. Benoît Leguet

- 40 pages.

La Compensation, qu’est-ce que c’est ?

Tout le monde a au moins entendu parler du protocole de Kyoto, des mécanismes de développement propre (MDP)… Ces protocoles et mécanismes impliquent les États et les très gros opérateurs, qui s’engagent à stabiliser et/ou réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et acceptent d’être pénalisés sinon…

La Compensation volontaire concerne tous les autres acteurs, c’est à dire nous, individus, entreprises, qui produisons des émissions de gaz à effet de serre par nos activités professionnelles et privées (déplacements par exemple). Nous ne sommes pas contraints à les réduire par les protocoles de Kyoto, notre contribution ne peut être que volontaire.

Nous pouvons déjà réduire au quotidien notre « empreinte » carbone en économisant l’énergie chez nous, en choisissant une voiture sobre et en ne l’utilisant que lorsqu’elle est irremplaçable, etc. Mais ces pratiques ont des limites : comment par exemple éviter l’utilisation de l’avion pour un voyage d’agrément ou professionnel ? D’où l’idée, en complément de pratiques sobres en CO2, de compenser ses émissions en finançant une réduction d’émissions équivalente chez un autre acteur : par exemple, les émissions du voyage en avion seront compensées par une contribution volontaire au financement d’un projet d’énergie renouvelable qui a permi d’économiser la quote part de la quantités de CO2 émise par l’avion pour ce voyage.

C’est ce que proposent de nombreux prestataires spécialisés, dont six en France :

- > CO2Solidaire, créé en 2004

- > Action Carbone, créé en 2006

- > Climat Mundi créé en 2006

- > Eco-Act créé en 2006

- > Forest Avenir, créé en 2006
- > Urgence Climat, créé en 2007.

Les difficultés et la controverse

Au regard de l »impact sur l’environnement, la compensation est assurément pertinente : le rejet d’une tonne de gaz à effet de serre dans l’atmosphère a en effet le même impact sur le réchauffement de la planète, quelqu’en soit le lieu d’origine. Donc : si j’émets 2 tonnes de gaz à effet de serre, que je compense par le financement d’un projet qui va économiser ces deux tonnes ailleurs, le bilan gobal pour l’environnement sera nul.

Mais le sujet reste compliqué et assez controversé.

La compensation pose à la fois des problèmes d’éthique et des problèmes de méthode.

  • Côté éthique, ce type de mécanisme n’est qu’une réponse ex-post au problème du changement climatique. On ne réduit pas les émissions de gaz à effet de serre à la source. On continue à prendre l’avion comme avant mais on paie quelques euros pour financer par exemple un projet de plantations d’arbres pour séquestrer du carbone. On peut se demander en fait quelle est la capacité de ce genre de système à induire les nécessaires changements de comportement (moins prendre l’avion par exemple…). Certaines experts en France parlent d’ « indulgences climatiques ».
  • Ensuite, il y a les questions plus techniques et méthodologiques. Aujourd’hui, beaucoup de compagnies aériennes, d’entreprises de l’industrie automobile, etc. proposent des systèmes de compensation (par souci d’image citoyenne). Chacun calcule un peu comme il veut la tonne de carbone émise pendant tel ou tel trajet (et son équivalent en euro). Il n’y a pas de méthode standard de calcul qui s’impose à tous. Le consommateur n’a aucun moyen de vérifier ce calcul, il paye. En outre, il n’y a pas encore de système de suivi pour s’assurer que l’argent versé permet bien de réduire les émissions de gaz à effet de serre : le consommateur n’a donc pas de garantie que son acte volontaire de compensation ira bien financer un projet de séquestration du carbone.

Un groupe de travail animé par l’ADEME tente de définir une Charte de bonne conduite : le Groupe Action-Climat des ONG française aussi

C’est notamment pour ces raisons que l’ADEME a mis en place un groupe de travail en 2007. Il se propose d’harmoniser les différentes démarches des prestataires qui opèrent en France. Les ONG françaises se sont aussi organisées au sein du Groupe Action-Climat pour structurer les pratiques et apporter aux consommateurs les garanties requises que leur acte volontaire aura les effets de compensation escomptés.


Quelques contacts utiles pour aller plus loin :

  • La Caisse des Dépôts, Mission Climat. Ce site propose d’autres notes techniques sur ces questions de séquestration du carbone également interessants.
  • CO2Solidaire : le GERES a été le premier à proposer un système de compensation à travers le site CO2Solidaire.org. Il publie une Lettre (diffusion numérique), abonnement gratuit sur le site.
  • L’ADEME s’implique dans les processus de changements climatiques ; ses activités sont présentées sur cette page de son site.
  • Le réseau Action-Climat France (RAC – F) : ce Réseau est une association spécialisée sur le thème de l’effet de serre et du changement climatique. Il est le représentant français du réseau mondial d’ONG concernées par les changements climatiques, le « CAN : Climate Action Network », qui comprend plus de 350 membres sur les cinq continents. Le RAC-F regroupe une quinzaine d’associations françaises de défense de l’environnement, d’usagers de transport, et d’alternatives énergétiques.
  • Volontary Carbon Offset – Information Portal, un site en anglais soutenu par SEI (Stockolm Environment Institut) et TUFTS, très riche d’informations sur la compensation.

René Massé


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