lundi 4 août 2008

Italie : réunion à la FAO sur la crise alimentaire… où on reparle des biocarburants !

Un sommet de la FAO s’est déroulé à Rome sur la sécurité alimentaire dans le monde du 3 au 5 juin 2008. C’était l’occasion de rechercher un improbable consensus sur la place des biocarburants. Cet article est une revue de presse de la Mission Agrobiosciences.

Manger et conduire grâce à l’agriculture… les biocarburants, cette belle idée qui faisait consensus dans les pays riches, il n’y a pas encore si longtemps, ne cessent de faire controverse tant ils se heurtent aujourd’hui à une question vitale : nourrir le monde.

Les récentes crises alimentaires, désastreuses pour des populations au quatre coins de la planète, mettent crûment en relief ce que l’on ne voulait pas, ou ne pouvait plus voir du côté de l’opinion des pays riches. Obnubilés par la sécurité sanitaire des aliments, nouvelle anxiété des pays riches alors même qu’ils disposent de l’abondance et de procédures de sécurité les plus sophistiquées, la sécurité alimentaire était finalement passée en arrière plan. Ainsi, les problématiques environnementales, autre emblème de nos préoccupations contemporaines, devenaient également une priorité, au point même que l’on prétendait faire en sorte que les pays plus pauvres adoptent pour eux-mêmes ces mêmes impératifs vitaux pour le bien… de la planète. De la nature.

C’était oublier cette autre priorité, constante celle-là : l’homme. Sa survie passe d’abord par la nourriture. Avec ces crises, nous assistons à une sorte de « réveil des consciences » note le directeur générale de l’association « Action contre la Faim » dans le « NouvelObs.com », par le fait que revienne dans l’actualité « l’idée qu’une grande partie de la population mondiale consacre à l’alimentation une grande part de son budget quotidien ». Il ajoute qu’il y a seulement six mois, un plaidoyer contre la faim dans le monde, avec appels de fonds… aurait sans doute été impossible.

Saisis à froid ce rappel au réel, les biocarburants passent d’un seul coup de la figure angélique qui les incarnait à celle d’un démon planétaire. Ils ne sont pas, loin de là, les seuls responsables de cette crise désastreuse, on les accuse de participer pour un tiers à l’augmentation des prix agricoles… Sur ce point, rapporte « 20 Minutes.fr » le secrétaire générale de l’Onu préconise « plus de recherches et d’analyse » afin de mesurer plus précisément leur impact sur la crise alimentaire. Rappelons quand même ces propos du numéro 2 du FMI, du 8 mai dernier, reproduit par « Nouvelobs.com » et qui précise que sur certaines matières premières, l’impact est fort « le développement des biocarburants serait responsable à 70% de la hausse récente du prix du maïs et à 40% de celle du prix du soja ».

Reste ceci : les biocarburants sont devenus pour l’opinion, avec les spéculations sur les matières premières et les subventions à l’exportation, l’un des emblèmes de ce désastre. C’est ainsi. « Le Monde.fr », rappelle que les propos des acteurs du sommet de la FAO à Rome, et alors même que le secrétaire général de l’Onu souhaite également un « plus grand degré de consensus » sur les biocarburants, dessinent plutôt le contours des dissensus en jeu… L’agence « Reuters » rapportait le même jour, que le secrétaire américain à l’agriculture avait dès le début de ce sommet « exprimé son doute, quand à la conclusion d’un accord » au sommet de la FAO sur la sécurité alimentaire qui se tient à Rome du 3 au 5 juin 2008 ».

Egalement ardent défenseur de sa production de bioéthanol, le Brésil, par la voix de son président, affirme, que les biocarburants « ne sont pas les bandits qui menacent la sécurité alimentaire des nations les plus pauvres », en rappelant que la totalité de l’éthanol est produite sur seulement 1% des 340 millions d’hectares agricoles. Pas du tout convaincu, le président de l’Egypte, pays qui a également connu de fortes émeutes de la faim, estime lui (Le Monde.fr 3 Juin) qu’il faut « freiner la production de biocarburants », en lançant un appel pour « un dialogue urgent entre importateurs et exportateurs de produits alimentaires et énergétiques ».

Pendant que des « petits pays » condamnent l’utilisation des terres arables pour les biocarburants, une nation se distingue : le Congo-Brazaville qui se dit prêt à discuter avec des investisseurs étrangers à cette condition : qu’ils achètent aussi la production locale pour leurs usines.


Source : Revue de presse (Nouvelobs.com. Le Monde.fr. 20minutes.fr. Reuters) de la Mission Agrobiosciences publiée le 5 juin 2008 sur son site sous le titre : « Crise alimentaire/FAO : Biocarburants de la figure angélique à celle de démon planétaire ? ».

René Massé

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